• Mardi 28 Mai, une envie d'écrire ...

     

    " Lilly regarda son reflet dans le grand miroir de verre, éclairé par deux spots de lumière braqués vers le bas. Elle détestait ces ampoules blanches, artificielles et violentes dont le seul résultat était d'accentuer les défauts. Elle s'empara de la palette de fard à paupière. Oui c'est cette couleur qu'il faut, pensa t-elle, pour faire ressortir mes fossettes. Ses cheveux bruns, tirés en un grand chignon dégageaient son visage et laissaient toute la place à ses yeux marrons en forme d'amande, essentiels à son charme. Satisfaite du résultat, Lilly attrapa le flacon d'eau de parfum et une douce odeur de vanille vint parfaire sa préparation. Bon, se dit-elle, ce soir je n'ai pas le droit à l'erreur. Une pointe de stress la fit se lever d'un bon et elle se retrouva debout dans ses petits chaussons blancs, la main à l'intérieur de son sac à main. A tâtons, elle chercha le journal du jour, chiffonné par le poids de son téléphone portable, du paquet de mouchoirs Lotus à la menthe et de son portefeuille. Pas de doute possible, c'était bien aujourd'hui. Elle ajusta son justaucorps blanc en relisant les dernières lignes de l'article à la Une du quotidien :"L'Opéra de Paris vous présente ce soir l'étoile montante Lilly Scatto dans cette première du Lac des Cygnes" ... 


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    Samedi 24 Mai 2014, 

     

    J'attends depuis déjà 15 minutes dans la petite salle en face du cabinet de consultation. Je suis à côté de la fenêtre mais l'immeuble est en travaux, et l’échafaudage m'empêche de voir la rue et les allers-retours des passants qui l'anime. La pile de magazines ne me dis rien, j'attends, assise, plongée dans mes pensées. Je suis plutôt contente d'avoir validée mon année de licence et ça résonne comme la preuve que je suis capable de réussir parfois . Finalement, je suis pas si nulle que ça. Bon, toutes mes notes ne sont pas glorieuses, mais ça me fait rire maintenant de me dire que j'ai réussie même avec un 3/20 dans la matière que je n'ai pas pu réviser. 

    Derrière la porte grise, ça bouge et ça parle, mon tour approche. J'avoue ne pas avoir très envie de voir Dr P. Elle est gentille, mais j'ai le sentiment que son suivi ne m'aide pas réellement. En fait, les progrès je les fais seule. Et puis, j'ai un peu peur aussi. Peur qu'elle me fasse le même discours qu'à chaque rendez-vous où presque. Parfois, ces mots me heurtent, même si ces propos ne sont pas violents et même si je sais que son but n'est pas de me faire mal mais de me faire réagir. Elle cherche tous les exemples possibles et inimaginables pour me faire avancer, me dis et me répète que je ne risque rien à me lancer, à essayer d'aller mieux. Si ça s'arrêtait là, ça irait, je serais pas en train de me triturer les mains en regardant l'affiche de "l'équilibre alimentaire", que de toute façon je connais déjà sur le bout des doigts et qui d'ailleurs m'agace au plus au point.

    Mais ça se complique quand elle me parle de la nécessité d'avancer pour éviter la rechute. Quand elle me dit que je n'ai qu'une petite vie et que je mérites bien mieux que ça. Quand elle me regarde dans les yeux et me dit que j'ai aussi le droit à un amoureux. Quand elle affirme avec certitude que je suis loin d'être bête, que je suis psychologiquement stable et entourée pour que ça fonctionne. J'ai souvent les larmes aux yeux et c'est difficile de ne pas les laisser couler quand elle prononce le mot "Chronicité". 

    Quand je ressors du vieil immeuble, à chaque fois je prends le temps de flâner avant de rentrer. De me vider la tête, et de me dire qu'il n'y a pas de raison et que moi aussi j'y arriverais. D'ailleurs, je progresse déjà mais ça, il faut être au quotidien avec moi pour s'en apercevoir. Je pense souvent à toi aussi, Tiffany. J'admire la force et le courage dont tu as fais preuve et qui t'ont permis d'avoir une vie quasiment normale aujourd'hui. J'aimerais te dire merci, parce que le début du combat, je l'ai mené à tes côtés et Dieu sait que ça m'a aidée ! Je garde précieusement tous les mots, de joies comme de colères que tu m'as adressée. Je les relis parfois. Alors en rentrant j'ouvre le carnet qui les contient. Un papier beige où tu as dessinée un coquelicot pour accompagner mon nom tombe au sol. Mes yeux s'arrêtent alors sur ta dernière phrase : "Tu es comme une pépite. Laisse-toi briller". 

     


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  • Mercredi 21 Mai 2014, 

    Pour toi (...)  

    Quand on s'est garés devant chez toi, le long du petit muret bordé de fleurs toutes aussi colorées les unes que les autres, j'ai eu un sentiment étrange. Un mélange de bonheur et de tristesse. Comme presque chaque dimanche depuis vingt-deux ans je viens te rendre visite, retrouver ce sourire qui se dessine sur ton visage dès que tu vois l'un de nous. J'adore sauter au dessus de la grosse flaque d'eau à l'entrée du garage, toujours présente, sous la pluie comme sous le soleil. En entrant, c'est l'habitude qui me guide dans l'obscurité et alors que n'importe qui se perdrait entre ton stock de savon de Marseille, ton vieux vélo et les paquets de publicité aux prix en francs, j’atteins l'escalier le sourire aux lèvres. En montant les marches, j'entends le bruit de ta chaise en bois que tu rapproches de la table, sûrement pour ranger un peu la cuisine après cet après-midi où tu as déjà eu de la visite. J'ouvre la porte et tu te retournes, la main encore dans le placard à ranger ta boîte de sucre. Tu es là, face à moi, tu me souries, heureuse de me voir accompagnée du reste de la famille. En nous embrassant, tu nous transmets cette sérénité qui fait que l'on se sent toujours bien chez toi.

    Et hop, tu ressors tout. Les tasses, les verres et assiettes valsent sur la table. Crêpes sucrées, biscuits et Far aux pruneaux les rejoignent illico. La cafetière reprend du service et toi, tu racontes. Blandine, la voisine est rentrée de l'hôpital ; Daniel et Hortense sont venus te voir ; Tu as été à la messe hier ; La famille Moignon est en vacances ici pour 15 jours ; Tu as perdue ton chat ; " Et mon far, il est bon ? Je l'ai trop cuit je crois. " On écoute avec attention les nouvelles, et moi je te regarde heureuse de voir que tu es toujours si pleine de vie.

    En face de moi, le mur qui donne sur le salon, avec plusieurs dessins fait de nos mains de petits-enfants accrochés ça et là. Les couleurs sont passées, les rayons de soleil qui traversent la fenêtre de la cuisine y sont pour quelque chose. Et pourtant, ces dessins ravivent en moi tout ce bonheur de partager des moments avec toi. Ces dessins ne sont que rire et joie de vivre. Ce sont tous ces matins d'école d'abord où encore ensommeillés, on nous dépose chez toi et où l'on regarde les dessins animés jusqu'à ce que tu nous conduise en classe. Ce sont tous les retours le soir, avec Nono en poussette sur la petite route qui nous conduit jusque chez toi. Ce sont d'énormes goûter Brioche/Confiture de Fraise et Myrtilles ou Crêpes Sucrées et Céréales Nesquick. Ce sont des journées entières à jouer dans l'abri de jardin avec de l'eau, des fleurs, de vieux bocaux. Ce sont des soirées à regarder les vaches "défiler" quand elles vont se faire traire. C'est se rendre compte qu'on aime la soupe, mais seulement la tienne. C'est rire à jouer au docteur dans la chambre du fond. C'est vouloir dormir chez toi à chaque vacances. C'est jouer dans la crêperie l'hiver quand il pleut. C'est se déguiser avec de vieux habits du grenier. C'est être émerveillé devant la pile de cadeaux au pied du sapin le 25 Décembre. C'est savoir que Choko est le plus heureux des chiens quand tu le gardes pendant notre absence.

    Quand je reviens à moi, tu t'es assise en face de nous et ton regard balaye la table, absent. Alors la tristesse ressentie à l'arrivée me revient. Parce que depuis 1933, de l'eau a coulée sous les ponts et que les années ont creusées sur ta peau de fines empreintes. Parce que pendant longtemps j'ai cru à tort que la vieillesse t'épargnerait. Mais, depuis quelques temps je ne pas ignorer que tu oublies un peu plus, que tu entends un peu moins, que tu vois très mal. Triste, je suis triste de me dire que j'ai face à moi la preuve que la vie n'épargne personne, pas même la meilleure de toutes les crêpières.

    Tu relèves alors les yeux vers moi, et je n'ai plus qu'une certitude. Profiter de toi encore et encore. Voler à la vie le plus de temps possible à tes côtés.


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    Dimanche 18 Mai 2014 

     

    Ridicule  

     

    Il y a des jours comme ça, où tout semble beau, calme, heureux. Des jours ensoleillés où la vie semble arrêtée. Comme une pause dans la tumulte quotidienne, dans la routine du métro-boulot-dodo. Ce sont ces jours-là, où depuis ma terrasse, mon esprit vagabonde le plus. Il s'amuse, s'envole et me joue des tours en se baladant à travers mes souvenirs heureux.

    Où plutôt ridicules. Ridicules comme Choko, mon chien, qui aboie sur une araignée en faisant des bons comme un fou. Ca me fait rire et je me remémore alors tous ces moments absurdes et pourtant si drôles. Ridicules. Ridicule, le jour où avec Nono on a gravés "VF" sur la tapisserie des toilettes après avoir vu "Vipère au Poing". Ridicule, de jouer au "Jungle Speed" entre cousines avec un pot de vinaigrette en guise de totem sous prétexte que c'est plus marrant quand on il se renverse (...) Ridicule, le jour où je me suis cramée l'index avec l'allume-cigare du Camping-Car tout en jurant de ne pas y avoir touché. Ridicule, de passer de la Bière au Café, sans transition, sur son balcon à 7 heures du matin. Ridicule de se désinfecter une coupure avec de la lotion anti-moustique. Ridicule de faire de la pâte à crêpes sucrées avec de l'huile d'olive. Ridicule de rouler une heure sur l'autoroute dans la direction opposée, GPS branché. Ridicule de vouer un culte à Thespis depuis le jour où ta prof de Philo l'a évoqué comme Dieu de la fête. Ridicule de devoir aller jusqu'en Chine pour manger des Oréos pour la première fois. Ridicule d'avoir 2,5/20 au contrôle de "rattrapage" du 1,5/20. Ridicule d'avoir plus de 20 ans et d'aimer regarder "La Reine des Neiges" de Disney. Ridicule d'oser publier mes textes ? Honnêtement, je ne suis plus à un "ridicule" près ...

     


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  • Vendredi 16 Mai 2014,

    C'était bon d'être là. Au milieu du salon de thé, installées sur une petite table en bois aux chaises assorties, l'une en face de l'autre. On a tout de suite fait le choix d'un petit coin tranquille, pour se protéger des nombreuses arrivées de groupes, près à entamer leur soirée par le premier verre de dix-huit heures. Je te vois plonger les yeux dans la carte et je sourie intérieurement, parce que je sais que tu as beau étudier tous les choix de boissons fraîches possibles et inimaginables, je sais que tu prendras un thé. La commande est prise, et en silence on observe, on sourie, on entame la discussion. Il y a des moments de blancs, des moments où tu sembles te perdre dans tes pensées, où tu sembles ailleurs, où je me demande en regardant tes grands yeux marrons si tu es gênée, inquiète ou seulement rêveuse.

    Mais c'est ça que j'aime chez toi Ameline. Parce que j'ai le sentiment que tu es toi, que tu es vraie. Quand tu sors de tes pensées, tu as toujours ce sourire aux lèvres qui revient, un autre sujet à aborder en buvant une nouvelle gorgée de thé. Dans ta robe blanche, en face de moi, entre les bribes de conversations nous parvenant des tables voisines et les odeurs de café, tu m'écoutes. Tu me comprends et me souris, tu vois toujours le positif. Tu m'encourage aussi, à écrire. Tu te souviens de ces textes rédigés à l'atelier d'écriture et tu me dis que je devrais tenter d'en faire quelque chose. Je te dis que je ne sais pas, que je vais y réfléchir, mais que pour le moment j'écris pour moi et c'est déjà ça. Tu insistes, gentillement, en faisant glisser le carré de chocolat noir sous ta langue. Tu me dis, les yeux pleins de paillettes que tu n'as jamais oubliée mes écrits romancés qui te faisaient voyager. Que tu n'as pas oubliée toutes ces histoires, et tu me donnes envie de m'y replonger.

    On s'est quittées, sur le pas de la porte du salon de thé, on s'est données un baiser au milieu de la terrasse ensoleillée et bondée. Tu m'as dis, "A bientôt, penses à ce que je t'ai dis". J'ai d'abord marché sans but dans la rue, profitant des derniers rayons de soleil de cette belle journée de Mai. Tes mots résonnant dans ma tête. En rentrant, j'ose ouvrir mes enveloppes dans lesquels j'ai rangée ces textes sans jamais les rouvrir depuis. Je survole les premières lignes et j'ai une seule envie. Te dire merci. Merci Ameline, de m'avoir aider à m'y replonger ...


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